Humoresques

Le rire. Enquête...

images/2021-BIBLIO-Flandrin005.jpg

 

Laure Flandrin, Le rire. Enquête sur la plus socialisée de toutes nos émotions. Paris, La Découverte, 2021, 369p, 24€

 

mot-clé : Rire, émotion, sociologie

 

L’analyse du rire comme « la plus socialisée de toutes nos émotions » est un travail passionnant conduit avec brio par Laure Flandrin. Dans la mouvance des travaux inspirés de la sociologie de Pierre Bourdieu, il s’agit d’une approche des variantes du rire dans la diversité des interactions sociales propres à la société française entre 2005 à 2016 dans le cadre d’un travail doctoral. Laure Flandrin est chercheuse associée au Centre Max Weber de Lyon et maîtresse de conférences en sciences sociales à l’École Centrale de Lyon.

"L’ouvrage se propose de « retrouver au fond du rire des classes d’expériences biographiques susceptibles de demeurer en nous sous la forme de dispositions à rire, de leur attribuer des contenus empiriques et de pointer les des supports culturels et des contextes sociaux à partir desquels elles s’activentLe rire est un signe anthropologique qui semble relever d’un universalisme évident. Mais pourquoi rions-nous ? En quoi les mécanismes du rire sont-ils susceptibles d’être éclairés par les sciences sociales ? Longtemps chasse gardée de certaines disciplines (théologie, philosophie, littérature, psychanalyse), le rire s’est désormais ouvert à la sociologie et fait ici l’objet d’une enquête sur la réception des arts comiques conduite à hauteur de rieur.

Qu’exprimons-nous de nous-mêmes, de nos expériences sociales, de nos relations aux autres et de nos opinions culturelles dans la déflagration instantanée du rire ? Ce livre propose d’explorer les expériences fondamentales du monde social qui nous constituent comme rieurs (l’apprentissage de la bipédie et du maintien corporel, l’ajustement au milieu technique, l’affectation par les pouvoirs, le passage des frontières sociales, etc.) et ambitionne de poser un cadre général de compréhension du rire. Ce dernier apparaît ainsi à la fois comme une manière de reconnaître des expériences du passé sur un mode autoparodique, un acte identitaire de catégorisation qui prend appui sur les fractures les plus dures du mode social, et une stratégie de distinction culturelle à l’intérieur du domaine comique où tout ne se vaut pas."(Présentation de l'éditeur)

Table des matières :

Introduction. Les sciences sociales remuées par le rire
Le rire entre voix commune et voie d’accès au vécu du rieur
Une sociologie du rire contre l’empire du rire
Une entrée par les pratiques culturelles comiques

Première partie. Les formes élémentaires du rire
1. Dégradation
L’histoire longue du rire de dégradation
Le rire de dégradation : un rire de sans‑grades ?
Comique de dégradation, ascension sociale et culture critique
Comique de dégradation et expérience du déclassement
2. Profanation
L’offense au sacré : figurations historiques du rire de profanation
Usages forts du rire de profanation : marginaux mais potentiellement polémiques
Usages faibles du rire de profanation : verrou moral et conservatisme politique
Rire des formes contemporaines du sacré : vers un « comique de salut »
3. Prétention
Figurations historiques du comique de prétention
Le comique de prétention, produit de l’expérience populaire de la fixité sociale ?
Rire de prétention et rieurs en ascension sociale contrariée
4. Suspension des automatismes pratiques
Universalité du rire et structuration verticale du corps humain
Tension corporelle et décompression des attentes de pertinence pratique
Tension corporelle et décompression des attentes d’excellence corporelle

Deuxième partie. La performativité du rire : le rire comme opération de classement social
5. Le rire et le lexique du national et de la race
Le rire et la fabrique des typicités nationales sur fond de rivalités mimétiques
La production d’une différence racialisée sur fond d’indistinction sociale menaçante
Le rire raciste comme réflexe d’affiliation communautaire sur fond de menace anomique
Au‑delà de l’inclusion et de l’exclusion, le rire comme ressource antiraciste
6. Le rire et le lexique de la classe sociale
Le rire comme exutoire à la violence physique et forme euphémisée de la distance sociale
Le rire de classe comme réflexe d’affiliation à la classe : le cas d’Alexandre, « héritier à histoires »
Quel modèle pour le rire de classe ?
7. Le rire et le lexique du genre
Dimorphisme sexué des dispositions à rire
Le rire comme lieu d’affirmation de la séparation dichotomique des sexes
« Nouvelles masculinités » et « nouvelles féminités » : la transgression comique des stéréotypes de genre

Troisième partie. Le rire dans tous ses éclats : rires d’en haut et rires d’en bas
8. Légitimisme et populisme du rire
Le légitimisme du rire : le rire comme ressource politique et culturelle monopolisée
Portraits de soi en rieurs légitimistes
Le populisme du rire ou la revendication populaire du comique
9. L’introuvable culture partagée autour du comique et du rire
La production historique des hiérarchies culturelles du rire
Le retour d’une culture comique partagée ?
Où passent les frontières entre rire savant et rire populaire ?
Conclusion. Comédie de la culture
Notes.

Accueil Bibliographie Le rire. Enquête...